Texte Georg Büchner (traduction Arthur Adomov)
Mise en scène François Orsoni
Dramaturgie Olivia Barron

Costumes Pascal Saint André
Perruques Cécile Larue & Ludovic Binet
Régie générale Antoine Seigneur-Guerrini & François Burelli
Scénographie Pierre Nouvel
Son Rémi Berger
Musique Thomas Landbo & Rémi Berger

Avec Brice Borg, Jean Louis Coulloc’h, Mathieu Genet, Alban Guyon et Jenna Thiam

Co-production Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis / MC93 Bobigny, Théâtre de la Bastille, Collectivité Territoriale de Corse, Ville d’Aiacciu

Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National


à propos

Longtemps, je ne me suis pas senti français. La Mort de Danton me fascine par ce retour qu’elle permet sur l’histoire de notre République, tel un récit des origines. Bien plus qu’à une simple interprétation, Büchner se livre à une autopsie du réel. Il expose les faits dans toute leur crudité, comme sur une table de dissection, les met à plat et les observe. Tout est là, le goût français presque fiévreux pour le verbe et sa puissance rhétorique, la dualité entre pouvoir exécutif et législatif, la force insurrectionnelle du peuple, toujours prête à ressurgir. Et surtout, ce qui me touche peut-être le plus, ce chaos provoqué par la mort du roi, le meurtre du père, la perte d’une figure patriarcale rassurante. Toutes les nations n’ont pas osé une telle transgression, cathartique. C’est là notre origine, une naissance qui s’est faite dans le sang.  

Mai 2015. Je réalise avec cinq acteurs un rêve ancien, une lecture de La Mort de Danton dans la majestueuse bibliothèque Fesch d’Ajaccio. Entendre ce texte pour la première fois en Corse, l’île où j’ai grandi, a un effet révélateur. Dans ce lieu figé dans une autre époque, celle de l’Empire, je suis frappé par la modernité de cette écriture, pareille à « une blessure qui ne s’est pas refermée » comme le dit si bien Jean-Louis Besson. Je repense au climat de terreur qui régnait sur la Corse des années 80, aux tribunaux révolutionnaires du FLNC, à ces visages encagoulés, aux attentats, à mes professeurs emprisonnés. Comment sortir de l’engrenage de la violence, telle est la question que pose Büchner. Avec une autre interrogation centrale, celle de la jouissance du pouvoir, si pertinente en Corse où les familles dominent le jeu des alliances politiques. Plus qu’ailleurs, le groupe y est à l’œuvre dans sa violence totalitaire. Enfin, c’est aussi le regard angoissé de Büchner qui me touche dans La Mort de Danton. Sa pensée vive, foudroyante. Cette pièce, il l’écrit juste après l’échec du Messager hessois, un pamphlet politique qui l’expose aux foudres de la justice. Traqué, il redoute une arrestation et trouve refuge dans l’écriture. De son désespoir naît un texte explosif, vertigineux, écrit à la hâte, en cinq semaines. La Mort de Danton s’élabore en séquences cinématographiques, bribe par bribe. Le temps s’emballe, il n’y a plus ni passé ni futur, seul un présent dévorant, monstrueux, qui submerge les acteurs de l’Histoire. 

L’audace de ce désordre me séduit. Büchner se moque des conventions, du beau comme du laid, seul compte le vivant. « En toute chose je réclame vie, possibilité d’exister et cela suffit » fait-il dire à Lenz dans la nouvelle éponyme. Pour La Mort de Danton, cinq acteurs incarneront à eux seuls l’ensemble des personnages de la fable, des grisettes aux grands hommes de la Révolution. Il faudra jouer vite, donner corps à toutes ces voix dans une ivresse continue. « La révolution fatigue (…), elle demande à ses acteurs d’être en permanence sur le qui-vive » soulignait déjà Heiner Müller. Nous jouerons hors des murs de la MC 93, à la mairie ou ailleurs, dans une scénographie bi-frontale qui accentue l’intimité. Ceci en miroir de l’action révolutionnaire qui n’avait pas de scène politique fixe et utilisait comme théâtre les maisons, les souterrains, les églises. La révolution s’est faite en huis-clos, gagnant de lieu en lieu, nomade. Les décisions se prenaient dans des pièces obscures, lugubres, sans dégagement. Tout visage y paraissait blafard, presque louche. On pense à Michelet citant César qui évoque « ces visages pâles où l’on croit lire des complots ». 


Diffusion

Théâtre de la Bastille, Paris, du 16 février au 4 mars 2017 
Théâtre de Bastia, 7 décembre 2016
Centre Culturel Universitaire, Spaziu Natale Luciani, Corte, 6 décembre 2016 
Théâtre Liberté, Salle Fanny Ardant, Toulon, 2 et 3 décembre 2016 
Théâtre d’Arles, 29 et 30 novembre 2016
MC 93, Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis, du 10 au 23 octobre 2016
Création Bibliothèque Fesch, Ajaccio, du 23 au 25 septembre 2016 


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